La superficie forestière mondiale s’est progressivement réduite au cours des dernières décennies, voire depuis plusieurs siècles. Entre 1990 et 2020, la réduction s’élève en moyenne à près de 6 millions d’hectares par an (Mha/an) . Cette diminution nette résulte d’une déforestation brute qui se trouve partiellement compensée par des boisements et la colonisation naturelle à l’œuvre par ailleurs. Entre 1990 et 2020, la déforestation brute s’est élevée en moyenne à 14 Mha/an, l’expansion portant quant à elle sur 8 Mha/an. Toutefois, on note sur la période une décroissance de la déforestation brute (de 16 Mha/an sur 1990-2000 à 15 Mha/an sur 2000-2010 puis à 11 Mha/an sur 2010-2020). Depuis 2000, l’expansion forestière s’est aussi réduite, si bien que la résultante, c’est-à-dire la diminution de superficie forestière, reste dorénavant au voisinage de 5 Mha/an.
La déforestation brute touche principalement des forêts tropicales, souvent primaires et riches en biodiversité . Selon la FAO, 90% de la déforestation est causée directement par l’agriculture (élevage compris).
La FAO a publié, en 2023, une étude qui bouscule un certain nombre d’idée reçues quant aux catégories de producteurs qui sont à la base de la déforestation tropicale. La FAO caractérise la petite exploitation (small-scale farming) par l’utilisation de méthodes non-industrielles, sur des surfaces limitées où le travail humain constitue l’investissement principal. Sur la période 2000-2018, l’étude FAO montre que 68% de la déforestation associée à l’agriculture (40% pour les cultures, 28% pour l’élevage) s’est produite sur de petites exploitations.
Selon une étude récente, 20 à 25% de la déforestation est associée au commerce international des produits agricoles et forestiers . Les USA, la Chine et l’Union européenne possèdent « l’empreinte déforestation » les plus élevées dans le commerce international. Si elle constitue parfois le premier maillon d’une chaine qui aboutit à la déforestation (par le désenclavement de massifs boisés), l’exploitation forestière est rarement une cause directe de déforestation. Elle peut cependant induire une dégradation des forêts, manifestation plus complexe à appréhender que la déforestation dont elle peut cependant constituer le prélude.
La prise en compte de la déforestation par les politiques publiques sous l’angle des marchés responsables remonte à la déclaration de New York sur les forêts (2014) dans le cadre de l’ONU, suivie de la Déclaration d’Amsterdam (2015) entre six pays européens. Partie prenante de ces deux déclarations, la France s’est dotée d’une stratégie nationale 2018-2030 de lutte contre la déforestation importée (2018). Le rôle moteur qu’elle s’est ainsi donné au niveau européen et mondial s’est concrétisé en 2019 par une communication du G7 environnement, puis du G7, enfin de la Commission européenne. Cette communication de la Commission européenne a conduit à l’adoption en juin 2023 d’un Règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à la mise à disposition sur le marché de l’Union et à l’exportation à partir de l’Union de certains produits de base et associés à la déforestation et à la dégradation des forêts. Ce règlement dit « RDUE », qui comprend le bois et certaines productions agricoles « à risque de déforestation » reprend le concept de diligence raisonnée de l’ancien règlement dit « RBUE » sur les importations de bois en Europe. Mais, alors que le RBUE visait la seule légalité de l’exploitation forestière, le RDUE a pour objet de sanctionner la déforestation, même si celle-ci est légale dans le pays d’origine.
Finalement, les principaux produits visés par ces différents textes sont, à l’heure actuelle, le café, le cacao, le caoutchouc, l’huile de palme, le soja, le bœuf et le bois ainsi que les produits dérivés comme le cuir, le charbon de bois, le papier. La stratégie française cite en outre le coton, la canne à sucre, le maïs, le colza, les crevettes et produits miniers.
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Déforestation importée : enjeux géopolitiques
16/10/2024 à 14h30
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Introduction
Exposé(s)
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Les enjeux de développement de filières agro-exportatrices des pays en développement au regard de la lutte contre la déforestation importée
Robert NASIViande bovine et déforestation dans les pays du Mercosur
Philippe CHOTTEAU, Institut de l'ÉlevageLes enjeux de l’application du RDUE pour les entreprises de la filière bois européenne
Apolline HITZEL, Fédération Nationale du BoisOpportunités et risques liés au RDUE pour les forêts et les filières cacao et café au Cameroun
Omer MALEDY, Secrétaire exécutif du Conseil interprofessionnel du cacao et du café – CICC − au CamerounLes choix techniques et politiques ayant présidé au RDUE : conséquences géopolitiques et considération de possibles alternatives
Alain KARSENTYConclusion
par un Membre du Groupe de travail international