Homme de foi, de science et de culture, Bernard Saugier a suivi un parcours atypique à l’Université et dans la Recherche, passant des sciences physiques à l’écologie. Dans son Jura natal, imprégné par l’image de Pasteur, il découvre la physique nucléaire et la conquête de l’espace avec le Professeur Tournesol dans « Objectif Lune » de Hergé, et avec Albert Ducrocq, alors chroniqueur à Europe I. Il rêve de devenir chercheur. Ancien élève de l’Ecole Normale Supérieure, agrégé de physique, il effectue un recentrage sur la biologie, conseillé par ses anciens Pierre Joliot, René Heller et Maxime Lamotte. Il atterrit au CNRS à Montpellier pour étudier les échanges d’énergie et de matière entre la végétation et l’atmosphère sur tournesol puis sur luzerne. Il part ensuite 3 ans à Saskatoon au Canada pour participer à un projet sur la prairie dans le cadre du Programme Biologique International qui a mobilisé plusieurs centaines de chercheurs de divers pays pour étudier la production de biomasse des différents biomes terrestres et les processus associés.
Abandonnant à regret le Canada ainsi que le soleil de Montpellier, il est nommé en 1978 professeur d’écologie végétale à la suite de Gorges Lemée à l’Université Paris-Sud à Orsay. Il enseigne et avec son équipe commence à travailler sur la forêt d’abord sur la production de biomasse de taillis de châtaigniers et de peupliers (à la suite des chocs pétroliers), puis sur l’effet d’une augmentation du CO2 atmosphérique, et sur des modèles de production végétale, de l’écosystème à la biosphère. Il participe au programme Environnement du CNRS et anime le comité écosystèmes et changements globaux pendant plusieurs années. Avec son équipe il est associé à plusieurs programmes européens concernant la biomasse et les changements globaux et plus récemment à la culture avec jachère longue sur les hautes terres andines. Ils ont aussi participé au programme BOREAS de la NASA sur la forêt boréale canadienne, associant des mesures au sol, par avion et par satellite.
En marchant avec son épouse sur les chemins de Saint Jacques de Compostelle, Bernard Saugier qui est aussi coureur à pied, musicien et chanteur dans une chorale à Limours, président d’une association « Foi et culture scientifique », n’est pas loin de penser que l’écologie est une science contemplative. Cela n’exclut pas la nécessité du débat sur les retombées de notre société industrielle et de consommation. Ainsi à propos de l’avenir du plateau de Saclay il souhaite voir émerger un projet commun entre les agriculteurs et les citadins au sein de l’association « Terre et Cité ». Pour lui, le rôle des membres de notre Académie est d’être des « veilleurs ». Il nous faut à la fois rationaliser, éclairer et faire réfléchir sur les enjeux du XXIème siècle, en particulier le rôle et l’évolution de l’agriculture sur le long terme. B. Saugier a conclu son discours de réception le 6 janvier 2010 en invitant l’Académie d’Agriculture de France à poursuivre et développer le dialogue avec la société civile, les institutions et les médias afin de repenser nos valeurs fondamentales, modérer notre consommation matérielle en privilégiant les relations humaines et… apprendre à bien vieillir.