Depuis les années 60, en parallèle de la forte diminution du nombre d’exploitations agricoles, l'agriculture française s'est ainsi peu à peu spécialisée en termes d’ateliers de production et d'espèces cultivées, dans le but d'accroître l'efficacité économique des systèmes agrialimentaires. Cette phase de modernisation a permis d’atteindre les objectifs de production assignés à l’agriculture à l’époque mais a aussi engendré des impacts négatifs sur la santé des écosystèmes et des Hommes. Une transition de l'agriculture européenne vers des systèmes fondés sur la biodiversité et reposant davantage sur les services écosystémiques est une voie majeure pour relever les défis de l'équilibre entre production et préservation de l'environnement. Dans ce contexte, la diversification des cultures permet d’accroître la biodiversité au sein des champs, fournit de nombreux services écosystémiques et contribue à boucler les cycles des nutriments, tout en permettant de remplacer les intrants chimiques. Cependant, malgré ces bénéfices et les objectifs politiques affichés, la spécialisation est toujours à l’œuvre. La raison en est l’existence de nombreux freins interconnectés, non seulement techniques mais aussi organisationnels et institutionnels (politiques agricoles, réglementation, recherche, éducation, etc) qui résultent de l’alignement et de la grande cohérence du régime sociotechnique mis en place pendant la phase de modernisation. Ce « verrouillage » doit être surmonté par une transformation profonde du système sociotechnique qui gouverne les systèmes agrialimentaires actuels. Les voies permettant de déverrouiller concernent en particulier l’accompagnement des acteurs dans le pilotage du changement de pratiques plutôt que la fourniture de solutions clés en main, la réorientation des priorités de la recherche et des modalités de gestion et d’organisation de la recherche afin de prendre en charge la diversification, la révision des logiques exclusives de filières et l’alignement des stratégies au sein des filières agrialimentaires ainsi qu’une transformation profonde des politiques publiques et de la réglementation vers des mesures systémiques favorisant simultanément la diversification des cultures et la transformation des produits qui en sont issus.
La séance a pour objet de présenter les résultats scientifiques qui sous-tendent ces conclusions, de proposer des outils d’accompagnement et de coordination des acteurs et de mettre en débat les recommandations politiques associées, notamment pour la politique agricole commune.