
Jusqu’à la fin du 19e siècle, la totalité des fromages étaient fabriqués à partir de lait cru de vache, de chèvre ou de brebis. Depuis la pratique de l’épuration du lait par pasteurisation ou microfiltration, 15% seulement des fromages sont issus de lait cru en France. Ils représentent la majorité des produits labellisés (70% des produits AOC/AOP) ; en effet, leur richesse sensorielle est liée à l’extrême diversité de l’écosystème microbien du lait cru et aux nombreux enzymes présents.
Cette pratique a été interdite dans certains pays et soulève encore des polémiques en France, en raison des dangers sanitaires que certains microorganismes contaminants (par exemple, Listeria monocytogenes ou E. Coli productrices de toxines, responsables de syndrome hémolytique urémique) font courir à certaines populations sensibles, telles que les personnes âgées ou les femmes enceintes.
On assiste ainsi à un dilemme : favoriser une flore génératrice d’arômes spécifiques de chaque type de fromage tout en essayant de s’assurer de l’absence de flores pathogènes. D’importants travaux de recherche, notamment à l’INRA et chez Actalia, ont permis de caractériser les écosystèmes microbiens naturels du lait cru et d’en évaluer la variabilité, ainsi que l’innocuité. Des mesures drastiques d’hygiène de la traite à la fabrication de fromage ont permis d’assurer une certaine sécurité avec comme contrepartie, un appauvrissement microbien (laits paucimicrobiens) préjudiciable à la richesse organoleptique.